Les organisateurs des attentats du 17 août 2005 au Bangladesh disposaient d’un nombre important de complices et ont manifesté un degré élevé de coordination, puisque 300 à 400 petits engins auraient explosé à travers tout le pays, la plupart d’entre eux dans un intervalle d’une trentaine de minutes.
Le 23 février 2005, le Ministère de l’Intérieur du Bangladesh annonçait l’interdiction de deux mouvements islamistes, le Jagrata Muslim Janata Bangladesh (JMJB) et le Jama’atul Mujahideen Bangladesh (JMB). Ils étaient accusés d’avoir commis plusieurs attentats à la bombe et assassinats dans le but de répandre le désordre dans le pays.
Le 17 août 2005, le Bangladesh a subi une vague d’attentats qui ont causé un nombre relativement limité de victimes, mais ont atteint une ampleur peut-être inégalée quant au nombre simultané d’actions et à leur diffusion sur l’ensemble du territoire.
Entre 10h30 et 11h30 (heure locale), 300 à 400 petits engins à minuterie ont explosé dans 63 des 64 districts du pays, selon les dernières informations disponibles à l’heure où sont rédigées ces lignes (il semble que quelques engins avaient déjà explosé plus tôt, mais les données sont contradictoires). Selon les premiers rapports, il y aurait eu deux morts et peut-être des centaines de blessés, mais ces chiffres pourraient augmenter.
Dans la capitale, Dhaka, des explosions se seraient notamment produites devant le Club national de la presse et le Sheraton, devant la Banque du Bangladesh, dans un lieu situé à proximité de l’ambassade des Etats-Unis, sur le campus de l’Université, devant la Cour suprême, à proximité de l’aéroport, etc…
Les attentats ont provoqué des mouvements de panique. De nombreuses institutions et de nombreux commerces ont suspendu leurs activités. Les parents ont convergé vers les écoles pour ramener leurs enfants à la maison. Un état d’alerte rouge a été décrété et de nombreux points de contrôle mis en place.
Il s’agirait d’explosifs de fabrication artisanale: plusieurs engins qui n’avaient pas explosé ont en effet été saisis par la police. Les bombes auraient été abandonnées dans des paquets ou des sacs.
La police a arrêté plusieurs dizaines de suspects, mais certaines incertitudes semblaient encore régner quant à l’identité et aux motifs des auteurs de ces actions, même si le JMB semble être au premier rang des suspects. Selon des sources policières, une telle opération aurait demandé la participation de quelque 200 personnes. Des informations encore non confirmées laissent entendre qu’au moins un blessé suspecté d’avoir transporté l’un des engins aurait été identifié – il reste cependant à déterminer s’il savait ce qu’il transportait.
Des tracts en bengali et en arabe au nom du JMB auraient été retrouvés sur plusieurs sites de ces attentats. Les tracts retrouvés déclareraient: “Nous sommes les soldats d’Allah. Nous avons pris les armes pour la mise en application de la loi d’Allah.” Les textes déclarent par ailleurs que le JMB a déjà appelé deux fois le gouvernement à établir un ordre pleinement islamique, mais sans succès: si le gouvernement ne met pas en application les lois islamiques après ce troisième avertissement, le JMB entend passer à l’action. Les tracts critiquent également la démocratie, “arme principale pour établir dans le monde les forces du mal“. Les membres des forces armées sont invitées à ne pas obéir aux lois mauvaises, mais à celles d’Allah. Cependant, le ton général du tract semble surtout être celui d’un ultime avertissement, ce qui soulève quelques questions sur le lien avec les actions qui viennent de se produire au Bangladesh: dans l’attente de plus amples informations, la prudence reste donc encore de rigueur quant à l’attribution des attentats. Mais des membres du JMB ont été impliqués par le passé dans des attentats. L’on sait également que le groupe a organisé des camps d’entraînement pour ses militants.
Les autorités et les milieux économiques craignent les conséquences de cette vague de violence sur un pays pauvre. De tels incidents ne sont pas de nature à encourager des investissements.
Comme Terrorisme.net l’avait souligné dans un article publié en septembre 2004, le Bangladesh a subi depuiks 1999 de nombreux attentats à la bombe non élucidés, qui ont probablement causé – avant les attentats d’août 2005 – 150 morts et plus de 1.000 blessés. Mais jamais le pays n’avait subi une telle vague simultanée d’attentats visant l’ensemble de son territoire.
La plupart des ces attentats n’ont pas été élucidés. Face à la vague d’aujourd’hui, les services de renseignement ont confessé avec embarras n’avoir rien vu venir, tandis que certains policiers et hommes politiques lançaient des insinuations contre des partis d’opposition. Il paraît cependant difficile que l’enquête sur les événements du 17 août 2005 ne débouche sur aucune identification des auteurs des attentats, vu le nombre de personnes nécessairement impliquées dans une telle série d’explosions quasi simultanées.
Le Bangladesh apparaît aux observateurs depuis un certain temps déjà comme une poudrière. La piètre situation économique, les problèmes sociaux, la corruption omniprésente, la surpopulation, la facilité avec laquelle des groupes extrémistes peuvent recruter par conséquent des activistes, représentent autant de facteurs combinés qui se prêtent à des explosions de violence politique et à une instabilité. Les ressacs causés par le développement international de formes extrémistes d’islamisme n’arrangent rien.