Une conférence de haut niveau entre l’OTAN et la Russie qui s’est tenue le 9 décembre 2002 à Moscou portait sur la transformation des forces armées pour lutter contre le terrorisme. Conclusion: il est vital de créer des forces mobiles, bien entraînées et bien équipées.
Le vocabulaire de la “guerre contre le terrorisme” a des conséquences. Qui dit “guerre” dit non plus simplement lutte contre une menace criminelle, mais appel aux moyens utilisés par les Etats dans des conflits – et donc aux forces armées également. Nous commençons seulement à prendre la mesure des implications du 11 septembre 2001 et des réactions qui ont suivi ces attentats pour les nouvelles missions confiées aux forces armées, dans un contexte de redéfinition de l’après-guerre froide. Même si certains observateurs s’interrogent sur l’adéquation du recours à ces moyens…
Le sujet était en tout cas d’actualité lors de la conférence organisée le 9 décembre au ministère russe de la Défense. Elle portait sur les stratégies militaires en matière de lutte contre le terrorisme international.
Cette conférence a notamment permis à Lord Robertson, secrétaire général de l’OTAN, de prononcer une allocution sur le rôle des militaires dans la lutte contre le terrorisme. Il a commencé par souligner à cette occasion que beaucoup d’analystes, au cours des derniers mois, avaient mis l’accent sur les moyens non militaires de la lutte contre le terrorisme (lutte contre le financement du terrorisme, coordination policière, contrôles frontaliers, échanges dans le domaine du renseignement). Le secrétaire général de l’OTAN reconnaît bien sûr le rôle crucial de ces moyens. Mais l’on ne sera pas surpris de découvrir que Lord Robertson considère que les forces armées ont elles aussi un rôle important à jouer dans la lutte contre le terrorisme.
Il est cependant intéressant d’examiner les raisons qu’il avance ainsi que les conséquences qu’il en tire pour les militaires.
Tout d’abord – souligne Lors Robertson – la distinction entre guerre et terrorisme s’estomperait. Des groupes comme Al Qaïda opèrent, estime-t-il, à un plus haut niveau que le terrorisme classique, sans parler du risque de voir des groupes terroristes s’emparer d’armes de destruction massive.
Second argument: la distinction entre sécurité intérieure et sécurité extérieure s’estompe également. La “division du travail” entre forces de police et forces armées n’est donc plus complètement pertinente.
Troisièmement, les seules mesures défensives ne suffiront parfois plus pour protéger la population contre des attentats terroristes. Il faudra parfois déployer des moyens militaires pour réagir de façon offensive contre des réseaux terroristes, comme cela a été le cas en Afghanistan.
Conclusion: “La mission du siècle dernier [pour les forces armées] – la défense du territoire – est périmée et déplacée. Nous devons radicalement redéfinir ce que les militaires doivent faire si nous voulons efficacement faire face aux nouveaux défis d’aujourd’hui.”
Il en découle trois rôles pour l’instrument militaire dans la lutte contre le terrorisme:
- Antiterrorisme: des mesures défensives pour réduire la vulnérabilité lors d’attaques contre la population, le territoire, l’infrastructure et les systèmes d’information et de communication.
- Contre-terrorisme: mesures offensives pour détecter, prévenir et interdire des activités terroristes.
- Gestion des conséquences: mesures pour limiter les conséquences d’attentats terroristes et apporter le soutien nécessaire aux autorités civiles après de tels attentats (en particulier s’ils impliquent le recours à des armes chimiques, biologiques, radiologiques ou nucléaires).
Cela exige des forces légères et mobiles, bénéficiant d’un soutien stratégique aérien et maritime ainsi que d’un équipement moderne (communications, etc.). Et cela exige également un entraînement adéquat. Pas simplement pour éliminer des foyers terroristes, mais pour agir de la façon qui convient dans les contacts avec les autorités civiles et la population. Un usage “disproportionné ou inapproprié” de la force peut aller en sens contraire des objectifs poursuivis.
“Les forces armées d’hier – avec leurs innombrables chars, leurs QG fixes et leurs soldats statiques – ne sont pas suelement inutiles face à ces nouvelles menaces. Elles détournent les maigres ressources de défense qui devraient être affectées aux tâches urgentes de modernisation“, a souligné Lord Robertson.
La sommet de l’OTAN à Prague (21-22 novembre 2002) a approuvé un concept militaire de défense contre le terrorisme, a rappelé le secrétaire général de l’organisation. L’OTAN entend donc soutenir les efforts internationaux de lutte contre le terrorisme. La modernisation des forces militaires de l’OTAN est présentée comme s’inscrivant dans ce cadre. Lord Robertson a également évoqué le force de réaction de l’OTAN, qui devrait être capable d’entrer en action dans des délais très brefs. La structure de commandement sera également simplifiée.
Un autre aspect de l’activité de l’OTAN dans la lutte contre le terrorisme touche la coopération avec d’autres pays, “à commencer par la Russie“. La lutte contre le terrorisme est donc également présentée comme l’un des moyens permettant à la Russie de trouver sa place dans la “communauté euro-atlantique“.