Accusé de tous les maux, le secret bancaire suisse survivra-t-il aux attaques internationales? En toile de fond, c’est le lucratif secteur de la gestion de fortune qui est convoité. Entre mythe et réalité, analyse d’une loi devenue mondialement légendaire.
Sous couvert d’arguments moraux ou de lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent, l’Union européenne (UE), l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et Washington veulent faire plier Berne sur le secret bancaire.
En fait, la plupart de ces pressions internationales reposent sur des intérêts économiques. D’une part, les Etats veulent pouvoir prélever des impôts sans voir fuir à l’étranger leurs riches contribuables. De l’autre, les places financières étrangères lorgnent sur les fonds déposés dans les coffres helvétiques.
La place financière suisse gère quelque 3400 milliards de francs, soit environ 30% de la fortune privée mondiale déposée en dehors de son pays d’origine. Un gâteau qui suscite les convoitises.
Fisc inquisiteur
Actuellement, c’est le bras de fer entre Berne et Bruxelles sur la fiscalité de l’épargne qui occupe le devant de la scène. Afin de lutter contre la fuite des capitaux, l’UE entend instaurer un échange automatique d’informations entre les autorités fiscales.
Bruxelles désire que les pays tiers, dont la Suisse, suivent le même chemin et fournissent des renseignements sur les avoirs détenus par les ressortissants européens.Une mesure qui enverrait aux oubliettes le secret bancaire car elle obligerait les banques suisses à renseigner le fisc.
Sur un autre front, l’OCDE veut lutter contre la concurrence fiscale dommageable et prévoit un échange d’informations en matière fiscale sur une base très large. Ici aussi le secret bancaire est menacé.
Enfin, depuis les attentats du 11 septembre, les Etats-Unis ont introduit dans l’urgence des mesures pour mieux identifier la provenance de l’argent déposé dans ses coffres.
D’aucuns à Washington ont montré la Suisse du doigt, arguant que le secret bancaire protégeait des fonds terroristes.
Attaquées de toutes parts, les banques tentent de préserver cette confidentialité qui au fil des ans est devenue un atout concurrentiel de poids.Pour l’économie suisse, et surtout pour Genève et Zurich, l’enjeu est vital. La place financière helvétique assure 14% du Produit intérieur brut (PIB), occupe près de 120 000 personnes et couvre 18% des recettes fiscales du pays.
Luigino Canal
Article mis en ligne sur ce site avec l’autorisation de swissinfo.
Publication originale: 23 décembre 2002.
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