Tous les médias du monde ont parlé de la meurtrière explosion d’une voiture piégée à Kaboul le 5 septembre 2002 et de la tentative d’assassinat contre le président Karzai à Kandahar le même jour. Mais l’on sait moins que les habitants de Kaboul vivent constamment dans la crainte d’attentats, qui se produisent fréquemment, comme l’explique ci-dessous Shoib Safi, journaliste indépendant installé dans la capitale de l’Afghanistan. Son article illustre l’impact d’actions terroristes répétées sur l’état d’esprit des habitants d’une ville qui pensaient sortir de la période de guerre.
L’attentat à la voiture piégée qui a secoué Kaboul au début du mois de septembre a fait les grands titres de la presse internationale. Mais les habitants de la capitale ont appris à vivre presque quotidiennement avec des explosions de moindre importance.
Récemment, des réfugiés qui avaient trouvé abri dans les ruines de l’Ambassade soviétique, dans le sud de la ville, ont dû fuir après l’explosion d’une bombe cachée dans un étalage de fruits. Un homme a été tué, une femme a perdu ses deux jambes et trois autres personnes ont été blessées.
De petites charges explosives ont été placées dans des lieux très en vue, par exemple l’Hôtel Intercontinental, le Ministère des télécommunications, la maison d’hôtes des Nations Unies et le cinéma Bakhtar. Les aéroports de Bagram et de Kaboul ont également été visés la semaine dernière.
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“Il y a eu des combats dans notre pays pendant tant d’années que nous ne saurions être très surpris par de telles activités terroristes“, explique Helal Uddin, un responsable du Ministère de l’Intérieur, chargé des questions de sécurité.
Helal reconnaît que des extrémistes de plusieurs pays opèrent en Afghanistan. “Je ne peux pas dire que tous ces activistes ont été tués. Ils disposent des moyens leur permettant de commettre des attentats dans différentes parties du pays.”
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Certaines personnes pensent que les attentats à la bombe sont l’oeuvre d’éléments restants d’Al Qaïda. Ces soupçons ont été renforcés par la découverte d’un drapeau pendu dans une école à Maidan, à 30km à l’ouest de Kaboul, avec un inquiétant message signé par l’Emirat islamique d’Afghanistan – le nom donné au pays par les Talibans.
“Les gens devraient commencer le jihad contre les forces américaines“, déclarait ce texte. “Ils devraient donner abri aux moudjahidines dans leurs maisons. Quiconque déchirera ou détruira ce message perdra la vie.”
On comprend la nervosité des habitants de Kaboul. “Après les dernières explosions, il est manifeste que les autorités ne sont pas en mesure d’assurer la sécurité“, commente Mohammad Homayoon Shahab, un eployé du gouvernement.
Ghaffar, pour sa part, a ouvert un magasin dans la ville après être récemment revenu du Pakistan. “Nous sommes revenus à Kaboul parce que nous avions pensé que la sécurité régnerait dans notre pays, mais il y a eu trop d’explosions ces derniers jours. Nous nous disons maintenant que nous aurions mieux fait de ne jamais revenir.”
Le mois dernier, Akeen Zorlo, commandant en chef de la Force internationale d’assistance à la sécurité en Afghanistan (International Security Assistance Force, ISAF), avait recommandé au Ministère de l’Intérieur d’assouplir le couvre-feu sous lequel les Afghans ont vécu depuis trente ans. Mais plus d’explosions encore ont suivi sa demande.
“Je ne pense pas que le couvre-feu devrait être levé trop vite. Kabpul n’est pas le genre de ville où il fait bon vous promener la nuit“, remarque Helal. […]
Cet article a originellement été publié en anglais dans l’Afghan Recovery Report, N° 26, 6 septembre 2002, de l’Institute for War and Peace Reporting (IWPR).
© Institute for War & Peace Reporting, Londres.
Traduit de l’anglais par les soins de terrorisme.net