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La “dixième vie d’Al-Qa’ida”?

1 août 2011 Par Rédaction - Terrorisme.net

Dans son ouvrage Les Neufs Vies d’Al-Qaida, Jean-Pierre Filiu s’interrogeait sur le futur de l’organisation et proposait trois avenirs possibles: la “dissolution”, “l’éclatement” ou “l’agression”. Comme pour beaucoup d’analystes, ces trois cas de figure résumaient les futurs envisageables d’Al-Qa’ida. Les “printemps arabes” en Tunisie, en Egypte, la guerre qui fait rage en Libye et l’effondrement du pouvoir au Yémen offrent cependant de nouvelles perspectives. Même si les événements dans ces pays démontrent une nouvelle fois l’échec idéologique d’Al-Qa’ida et de son incapacité à adapter son discours à la réalité, un développement des capacités militaires de l’organisation créé incontestablement la possibilité d’une “dixième vie d’Al-Qa’ida”.

1. Les Neufs Vies d’Al-Qa’ida

246_inspireDans son ouvrage, Les Neuf Vies d’Al-Qa’ida (présenté sur ce site), Jean-Pierre Filiu détaillait les “neuf vies” (ou “métamorphoses”) opérées par Al-Qa’ida en l’espace de vingt ans. Il éclairait le caractère résolument dynamique de l’organisation et ses multiples transformations. Il terminait son analyse sur trois scénarios possibles pour le mouvement: la dissolution, l’éclatement ou un nouveau regain de violence suite à une agression internationale par des pays occidentaux.

C’est seulement dans le dernier cas que Filiu envisageaitune survie de l’organisation, sinon condamnée à une fragmentation qui sonnerait le glas des bribes de contrôle opérationnel dont dispose encore le noyau de l’organisation. Dans le cas de la dissolution, Al-Qa’ida sombrerait petit à petit dans l’oubli.

Dans ses réflexions, Filiu notait qu’une agression occidentale contre un pays musulman constituait le scénario le plus favorable pour Al-Qa’ida, qui pourrait ainsi continuer à agiter la bannière de la lutte contre les “infidèles”, et en particulier contre l’Amérique.

A l’époque de la rédaction de l’ouvrage de Filiu, c’est essentiellement une intervention en Iran (par l’Amérique, voire par Israël) qui aurait pu enflammer le monde musulman. La possibilité d’une intervention en Libye ne s’était pas encore dessinée.

Dans son analyse, il insistait sur l’échec idéologique et religieux d’Al-Qa’ida. Dans la partie de l’ouvrage consacrée aux faiblesses de l’organisation, il mettait en avant la pauvreté du message, qualifié de “bricolage”, ainsi que l’inversion des cinq piliers de l’Islam, complétés par un sixième pilier, le “jihad”, qui s’imposerait à chaque musulman.

Même si l’analyse politique et religieuse du nouveau chef d’Al-Qa’ida, Ayman al-Zawahiri, est en porte-à-faux avec les révolutions – pacifiques – arabes, la récente intervention en Libye et l’effondrement politique du Yémen pourraient offrir une “dixième vie” à Al-Qa’ida.


2. L’échec idéologique de la doctrine d’al-Zawahiri face aux printemps arabes

2.1 Chevaliers sous la bannière du prophète: le message violent de Zawahiri et les “printemps arabes”

C’est dans la perspective “du jihad avant tout” qu’il faut comprendre l’échec idéologique d’Al-Qa’ida par rapport aux printemps arabes. Ceci est particulièrement visible dans certains écrits du nouveau numéro un de l’organisation, Ayman Al-Zawahiri.

A la fin de l’année 2001 étaient publiés dans le quotidien Al-Sharq al-Awsat des extraits d’une des œuvres principales de l’Egyptien, Chevaliers sous l’étendard du Prophète, qui livre des éléments importants de sa doctrine. Il semble utile de restituer ici quelques passages et de les confronter aux récents événements survenus en Tunisie et en Egypte.

Pour Zawahiri, “il n’y a d’autre solution que le jihad”. En effet, selon lui, la solution prêchée par les Frères musulmans, la prédication est condamnée à l’impasse. C’est d’ailleurs afin de réfuter les méthodes utilisées par ces derniers que Zawahiri avait rédigé, au début des années 1990, le traité La Moisson amère. Les soixante ans des Frères Musulmans.

Pour Zawahiri, les méthodes utilisées par les Frères ne sont pas seules en cause: la démocratie ne constitue pas non plus une solution. Se référant au coup d’Etat en Algérie au début des années 1990, qui vit l’annulation de la victoire du Front islamique du Salut (ou FIS) par les urnes et la mise en place d’une dictature militaire, Zawahiri écrit:

“Ce qui a contribué au développement de cette conscience, c’est l’échec de tous les autres moyens qui se voulaient une échappatoire au fardeau du jihad. A ce propos, l’expérience algérienne constitua une sévère leçon (…). Car le FIS s’était comporté selon sa doctrine (…) il voulut passer par les urnes pour pénétrer dans les palais présidentiels et les ministères mais, à leurs portes l’attendaient des chars d’assaut (…). Ayant cru que les portes du pouvoir leur étaient grandes ouvertes, les hommes du FIS furent stupéfaits de se voir poussés sous les portails des prisons (…).”[1]

Comme on peut le constater, l’échec de l’expérience démocratique algérienne au début des années 1990 l’amène à penser que la seule façon d’imposer son programme est la lutte violente, le jihad. En 2006, dans le contexte des élections palestiniennes, Zawahiri avait critiqué le Hamas – branche des Frères musulmans – en déclarant que ceux qui essaient de libérer la Palestine par les élections n’en libéreront… pas un grain de sable.

Marqué par ces échecs, Zawahiri ne semble pas avoir considéré la possibilité d’un renversement pacifique des régimes arabes, comme dans le cas de la Tunisie ou de l’Egypte.

Dans son ouvrage, le nouveau leader d’Al-Qa’ida situe également le rôle des jihadistes. Selon lui, ils doivent constituer une avant-garde “qui doit se rapprocher des masses, défendre leur honneur, les protéger, les guider, les mener à la victoire, les précéder au sacrifice (…)“.

Pour Zawahiri, le mouvement jihadiste doit “entrer dans la bataille au sein de l’oumma et devant elle” mais prendre “bien garde à ne pas s’isoler de son oumma en menant une lutte élitiste contre le pouvoir“.

2.2 “L’arrière-plan négligé”

Un exemple plus récent des réflexions de Zawahiri sur les printemps arabes est proposé dans un numéro de la revue jihadiste de langue anglaise Inspire, publié en mars 2011.

Depuis juillet 2010, Al-Qa’ida dans la péninsule arabique (AQPA) publie ce magazine en ligne dont cinq numéros réguliers sont parus, ainsi qu’un numéro spécial, consacré aux attaques aux colis piégés organisés depuis le Yémen en 2010. Le dernier numéro est paru en juillet 2011.

Alors qu’Inspire avait fait grand bruit lors de la publication de son premier numéro, le spécialiste norvégien Thomas Hegghammer rappelle que ce journal n’a rien d’exceptionnel. Il ne s’agit ainsi ni du premier journal jihadiste en langue anglaise, ni du plus original, certains contenus semblant tout simplement… recyclés, Comme on pourra le constater, l’utilisation d’anciens articles – repris sous des titres aguicheurs et plus actuels – donne incontestablement raison au chercheur norvégien.

La contribution de Zawahiri s’intitule la “l’arrière-plan négligé” (“the overlooked backdrop“) et prend spécifiquement position sur les “printemps arabes”, en Egypte et en Tunisie. Il commence par saluer “ceux qui se sont soulevés pour résister aux dirigeants oppresseurs et traîtres“. Il énumère ensuite les méfaits de ces derniers avant d’inciter ses lecteurs à “étudier avec attention” ce qui se passe en Tunisie et en Egypte.

Selon Zawahiri, cette étude s’avère nécessaire afin “de ne gaspiller ni la noble colère des uns ni le soulèvement des gens libres” et afin que le résultat de ces “soulèvements ne soit pas usurpé“. Zawahiri met en garde contre l’Amérique qui “prend l’initiative de changer les régimes” traîtres et de les “remplacer par de nouveaux visages qui trompent les masses par de simples réformes et la liberté“. Pourtant avertit l’Egyptien, les “intérêts de puissances dédaigneuses et oppressives du monde sont maintenus et bien protégés“.

C’est dans cette perspective qu’il faut voir le gouvernement tunisien de transition: après avoir senti que l’ancien président Ben Ali était “grillé, l’Amérique l’a évacué dans la poubelle de l’histoire (…) et ils [les Américains] ont ensuite fait des déclarations félicitant le nouveau gouvernement, qui est une extension des gangs de Ben Ali et de la horde de ses associés“.

De plus, “c’est un nouveau gouvernement qui donne au peuple des aspects mineurs de la liberté, de légères réformes et la libération de certains prisonniers (…). Cependant, les “rênes du pouvoir gouvernemental sont toujours dans les mains des représentants américains, leurs agents et leurs soldats.”

De ce fait, “c’est le devoir du peuple libre de Tunisie de barrer le chemin à cette escroquerie et de continuer ses sacrifices et ses efforts jusqu’à ce que la Tunisie redevienne un château de l’islam, [une terre de] jihad et de ribat“. Zawahiri continue en affirmant que “le peuple tunisien doit assumer son rôle en défendant Jérusalem, en assistant les moudjahidines où qu’ils soient en terre d’Islam et aider les opprimés, ainsi qu’à libérer les territoires musulmans occupés par les armées des Croisés contemporains en Afghanistan, au Pakistan, en Irak, dans la péninsule arabique, en Somalie et au Maghreb islamique.”

Il conclut en exhortant les “peuples de liberté et d’honneur en Tunisie, en Egypte et dans chacun des pays musulmans: qu’Allah bénisse votre fermeté, votre persévérance et vos sacrifices. Le chemin de la libération de l’oummah de ses envahisseurs est encore long (…).”

Les réflexions de Zawahiri suivent un schéma bien connu: l’expérience de démocratisation en Tunisie et en Egypte est trompeuse. En effet, selon lui, il ne s’agit que d’une illusion et le pouvoir tyrannique de Ben Ali a été remplacé par un autre pouvoir à la solde de l’Amérique, qui continue à défendre ses intérêts.

De ce fait, les efforts entrepris jusqu’ici sont insuffisants et les peuples tunisien, égyptien et autres doivent continuer à se battre pour qu’ils ne soient pas privés des fruits de leur lutte. En d’autres termes, la mobilisation des peuples tunisien et égyptien n’est qu’une étape dans le long combat qu’est le jihad.

C’est dans cette perspective qu’il faut interpréter la présence, dans le même numéro d’Inspire (mars 2011) d’un autre texte de Zawahiri, plus ancien. Il s’agit de la transcription d’un entretien de 2007, repris sous le titre aguicheur de “Les plans à court et long terme après les protestations“.

Zawahiri y déploie son programme de jihad articulé autour des notions d'”ennemi éloigné” et d'”ennemi proche“. Il propose de se focaliser d’abord sur l'”ennemi éloigné“, la lutte contre les intérêts judéo-croisés qu’il s’agira de combattre à court terme, dans leur propre pays, mais également en Irak, en Palestine, en Afghanistan et en Somalie.

A long terme, il s’agit de se recentrer sur l’ “ennemi proche“, les régimes “corrompus et corrupteurs” à l’œuvre dans les pays musulmans. Le plan à long terme comporte plusieurs niveaux qui accordent une grande importance au “mouvement jihadiste pour le changement” et à l’usage de la force, possible sous différentes formes (coups militaires, soulèvement populaire, guérilla, résistance politique armée). Ce changement doit être orchestré par une organisation – Zawahiri pense probablement à la sienne, Qa’idat al Jihad. Pour compléter ce combat, il propose d’accourir sur les champs de bataille du jihad (Palestine, Afghanistan…).

Zawahiri argumente ici sans véritablement modifier la perspective proposée dans Chevaliers sous la bannière du Prophète: seule la lutte armée saura véritablement libérer les populations musulmanes de leur joug. Les révolutions pacifiques ne sont qu’une étape – préliminaire – dans cette lutte.

Aux larmes et au sang versés par les Tunisiens et les Egyptiens, Zawahiri oppose un argument d’insuffisance, dicté par une “arrière-plan ignoré” qu’il s’empresse de révéler.

On se demande si cette révélation permettra vraiment à l’avant-garde jihadiste de se “se rapprocher des masses, de défendre leur honneur, les protéger, les guider, les mener à la victoire, les précéder au sacrifice” comme le préconise Zawahiri…


3. Capitalisation des frustrations et résilience possible d’Al-Qa’ida

Même s’il reste fidèle aux arguments proposés au début des années 2000, ses déclarations semblent montrer peu de compréhension à l’égard des efforts consentis lors des révolutions tunisienne et égyptienne. L’idéologie d’Al-Qa’ida montre ses limitations et sa difficulté à s’adapter à de nouvelles réalités.

Il ne faut cependant pas sous-estimer la possibilité d’une résilience de l’organisation qui pourrait prendre deux dimensions: une dimension opérationnelle et une dimension politique et opportuniste de capitalisation des frustrations engendrées par les révolutions en cours.

De nombreux rapports font ainsi état de mécontentements populaires liés aux processus démocratiques et au traitement du passé. Ainsi, le 8 juillet 2011, des milliers de personnes s’étaient à nouveau rassemblées sur la place Tahrir du Caire (mais également à Alexandrie et à Suez) pour exiger plus de réformes et une sanction contre les forces de l’ordre impliquées dans la mort de manifestants au début de l’année. De plus, en mai dernier déjà en Tunisie, plusieurs manifestations exigeant des réformes plus importantes étaient réprimées par la force à Tunis, nécessitant la mise en place d’un couvre-feu. En outre, le 21 juillet 2011, le président ad interim prolongeait l’état d’urgence en vigueur dans le pays depuis le 14 février 2011 pour une durée indéterminée. Même si celui-ci sera probablement levé à l’occasion des élections, on se souvient qu’un «état d’urgence de durée indéterminée» qui avait permis au président égyptien de se maintenir au pouvoir pendant près de trente ans… De multiples compte-rendus rapportent enfin les difficultés du processus tunisien, ainsi qu’un recul économique important, liée à une crise du tourisme dans le pays.

On peut ainsi s’imaginer que Zawahiri – malgré ses œillères idéologiques – ou d’autres leaders régionaux tentent de capitaliser sur les mécontents pour “démontrer” que la révolte pacifique n’était qu’une première étape et ainsi justifier leur message violent.

Quant à une possible résilience opérationnelle, on a observé ces dernières semaines différentes incursions d’Al-Qa’ida en Tunisie notamment, depuis la frontière algérienne. Ainsi, au mois de mai dernier, un colonel tunisien aurait été tué dans la région de Kasserine, près de la frontière, par des “hommes fortement soupçonnés d’appartenir à Al-Qa’ida au Maghreb islamique“.


4. Al-Qaida en Afrique du Nord et en Afrique sub-saharienne

4.1 La Libye
Les interventions possibles d’Al-Qa’ida, et de sa branche maghrébine et sahélo-saharienne, n’est pas sans soulever un certain nombre d’inquiétudes. Outre la possibilité d’une pénétration sur territoire tunisien, ce sont bien les activités d’Al-Qa’ida au Maghreb islamique (AQMI) qui sont préoccupantes.

En effet, selon de nombreuses sources, les combattants d’AQMI auraient pu récupérer de nombreuses armes lourdes et des explosifs depuis la Libye, écoulés ensuite dans la zone sub-saharienne au Mali et au Niger. Ainsi, les autorités nigériennes auraient récemment intercepté près de 640 kgs d’explosifs et des détonateurs à la frontière avec la Libye. Au début avril 2011, certains rapports faisaient état du vol par AQMI de missiles sol-air et de roquettes anti-char. Selon ces sources, ces armes auraient été transférées de la Libye vers la bande sahélienne.

4.2 Afrique sub-saharienne: mercenaires et trafic de drogues

Outre le transfert d’armes vers le Niger et le Mali, il est également permis de craindre que d’anciens mercenaires sub-sahariens aux services du colonel Kadhafi ne viennent grossir les rangs d’AQMI. Ainsi, le New York Times révélait à la mi-mars les efforts entrepris par les forces de Kadhafi pour recruter des mercenaires en Afrique sub-saharienne, en particulier au Mali, au Niger et au Darfur.

Au début mars, de nombreuses sources – notamment l’Agence France Presse et la BBC – indiquaient le recrutement de plusieurs centaines de Touaregs. Même si l’issue du conflit libyen reste pour l’heure indécise, l’éventuel retour de ces mercenaires pourrait poser de sérieux problèmes de sécurité au nord du Mali et au Niger.

Outre l’acquisition d’explosifs et de système d’armes plus avancés, on a également observé une collusion entre trafic de drogues et AQMI dans la bande sahélienne. Ainsi, Alexandre Schmidt, représentant pour l’Afrique de l’Ouest et centrale de l’Office des nations Unies contre la drogue et le crime (UNODC) a officiellement attesté des liens entre criminalité et terrorisme dans cette région. Selon lui, AQMI faciliterait, moyennant indemnisation, le passage de divers trafics (drogues mais également trafic d’êtres humains, contrebande de cigarettes, de médicaments contrefaits etc.) dans la bande sahélienne. Il n’est cependant pas clair dans quelle mesure cette branche d’Al-Q’aida serait directement impliqué dans le trafic.

4.3 Al-Qa’ida au Maghreb islamique: du terrorisme à la criminalité…

De terroriste, il semble qu’AQMI soit devenue une organisation criminelle dont les objectifs politiques deviennent indissociables de visées économiques.

Ainsi, on constate que, depuis 2007 et les attentats-suicides perpétrés à Alger, AQMI s’est petit à petit spécialisé dans les activités économiques, telles la prise d’otages occidentaux ou la facilitation de trafics en tout genre (drogues, êtres humains, cigarettes, médicaments) dans la bande sahélienne.

En janvier 2009, Al-Qa’ida kidnappe quatre touristes occidentaux (deux Suisses, un Allemand et un Britannique). Alors que l’otage britannique fut assassiné en mai, les autres otages furent relâchés. A la fin novembre, trois travailleurs humanitaires espagnols furent enlevés. Cet événement avait été précédé de quelques jours par la prise d’un otage français, relâché en février 2010 [2].

Ces enlèvements furent suivis, quelques semaines plus tard, par le kidnapping d’un couple italo-burkinabè en décembre 2009. Les otages furent ensuite relâchés.

2010 fut également marqué par de nombreux enlèvements: le 19 avril, le Français Michel Germaneau fut pris en otage. Celui-ci fut exécuté par ses ravisseurs le 25 juillet, après une tentative de libération échouée. Le 16 septembre, AQMI kidnappa sept collaborateurs de l’entreprise française Areva à Arlit, au Niger. Trois ont été ibérés, quatre demeurent prisonniers.

La transformation d’AQMI d’acteur politique en acteur plutôt “économique” peut s’illustrer par l’évolution des revendications autour des otages d’Areva. En effet, alors que l’organisation avait exigé le retrait des troupes françaises d’Afghanistan pour libérer les otages, elle a ensuite commué ses revendications en exigeant plusieurs dizaines de millions d’euros (près de 90 millions, selon certains chiffres ), abandonnant ainsi des exigences politiques pour des considérations économiques.

L’année 2011 a débuté par un double enlèvement au cœur de Niamey, capitale du Niger. Deux jeunes français avaient été kidnappés dans un restaurant du centre-ville le 7 janvier. Après une course poursuite avec les ravisseurs, les deux otages ont été tués lors d’une tentative de libération. Moins d’un mois plus tard, une ressortissante italienne a été enlevée par AQMI en Algérie.

Même si la plupart des gouvernements occidentaux nient avoir payé des rançons, il est probable que les prises d’otages auront permis à AQMI d’amasser des sommes conséquentes, difficiles à chiffrer. Ainsi, considérant les recettes probables des enlèvements et des trafics, un expert malien parle de plusieurs dizaines de millions de dollars.

4.3 … à la guérilla?

L’un des éléments les plus importants de la définition de la guérilla réside dans la “volonté d’établir un contrôle physique sur un territoire“. Même si la tentative de contrôle échoue ou si elle n’est que partielle, l’utilisation de cette méthode vise à créer des sortes de “zones libérées“, base pour la poursuite ultérieure de la lutte [3].

Ainsi, on a observé ces dernières semaines plusieurs affrontements entre les forces de défense et de sécurité mauritanienne, malienne et AQMI qui portent à croire que l’organisation bénéficierait de capacités supplémentaires qui pourraient provoquer un changement de stratégie.

Le 5 juillet 2011, des combattants d’AQMI ont attaqué une base militaire mauritanienne dans la ville de Bassiknou, au sud-est du pays. Cette attaque avait été précédée d’un autre affrontement entre AQMI et les forces mauritanienne et malienne, dans les environs de la forêt de Wagadou, à l’ouest du Mali, à la fin du mois de juin 2011.

Outre ces récentes attaques, plusieurs affrontements ont déjà eu lieu par le passé entre AQMI et les forces de défense et de sécurité de la région. Ainsi, en septembre 2008, une attaque avait coûté la vie à une dizaine de soldats, au nord de la Mauritanie. En juillet 2009, près de 30 soldats maliens avaient été tués dans une attaque dans le nord du pays, alors que près de 15 militaires algériens avaient perdu la vie lors d’une attaque le même mois.

A propos des récents affrontements, un site guinéen titrait qu'”AQMI est décidément gonflé!” Au-delà du caractère anecdotique de ce titre, celui-ci laisse perçoit bien qu’AQMI semble effectivement diposer d’une certaine confiance et de capacités accrues qui lui permettent de s’attaquer de front à l’appareil de sécurité et de défense d’un pays de la région.

Cette confiance pourrait également laisser augurer d’une orientation vers une tentative de contrôle d’une portion de territoire dans la bande sahélo-sahélienne. Cela reste à voir.

4.5 Al-Qa’ida dans la péninsule arabique (AQPA)

Outre un possible renforcement des capacités de la branche maghrébine d’Al-Qa’ida, “les printemps arabes” semblent également avoir des conséquences pour d’autres branches de l’organisation.

4.5.1 Anwar al-Awlaki: “le tsunami du changement” ou “notre message est obsolète… et alors?”

Dans l’avant-dernier dernier numéro d’Inspire paru en mars 2011, Anwar Al-Awlaki livre, dans un article intitulé “Le tsunami du changement“, quelques réflexions sur les raisons qui le poussent à croire que les printemps arabes constituent une aubaine pour Al-Qa’ida.

Al-Awlaki, un ingénieur américano-yéménite et principal idéologue d’AQPA, s’est illustré par le recrutement et l’endoctrinement d’Hassan Nidal Malik, “le loup de Fort Hood”, responsable du massacre sur cette base américaine en 2009. C’est également auprès de lui qu’aurait été radicalisé Umar Faruq Abdulmuttalab, le jeune Nigérian de 25 ans qui avait tenté de faire sauter un avion de ligne au-dessus de la ville de Détroit le 25 décembre 2009.

Au contraire de Zawahiri, prisonnier d’une rhétorique vieille de dix ans autour du seul moyen de lutte (le jihad) et de la libération de Jérusalem, Al-Awlaki argumente de façon pragmatique.

Il discute l’argument invoqué précédemment selon lequel les printemps arabes, pacifiques, discréditent la lutte d’Al-Qa’ida. Il rapporte les propos de la Secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton selon lesquels “le succès de protestations pacifiques ont discrédité les extrémistes et montré la faillite de leurs arguments“, ainsi que ceux de Peter Bergen pour qui “les jihadistes d’Al-Qa’ida doivent regarder ces événements avec un mélange de jubilation et de désespoir” du fait que d’une part les régimes honnis ont été renversés, mais d’autre part “qu’il est très peu probable qu’une théocratie de style taliban remplace les régimes déchus“.

Awlaki n’argumente pas en termes idéologiques, refusant par là le débat suscité par la réflexion d’Hillary Clinton. Son argument est uniquement “capacitaire”.

En d’autres termes, même si l’issue des printemps arabes n’est pas connue, Awlaki remarque que, “indépendamment du résultat, nos frères moudjahidines en Tunisie, en Egypte ou en Lybie et du reste du monde musulman auront une nouvelle chance de respirer après trois décennies de suffocation“. Selon Awlaki, la “répression que le mouvement islamique en Egypte a connu au début du régime de Moubarak et qui a continué les trente années suivantes ne sera pas possible sous un gouvernement égyptien post-révolutionnaire (…) Même si les gouvernements futurs voulaient continuer avec une politique d’apaisement face à l’Occident et à Israël, ils n’auraient pas la force la force et la profondeur du pouvoir que les gouvernements précédents avaient développé durant trois décennies.”

Ainsi, selon lui, les printemps arabes vont permettre de libérer les moudjahidines, qui pourront ainsi se regrouper. Par exemple, dans le cas de la Libye, “Kadhafi a rempli les prisons libyennes de milliers de nos frères moudjahidines. Grâce à l’agitation actuelle, ces frères auront une chance de se regrouper et de se reconnecter avec leurs frères dans le Maghreb. Avec les événements en Tunisie, en Libye et en Algérie, le jihad au Maghreb islamique assiste à une nouvelle aube.”

Awlaki place également de grands espoirs dans son pays, “le Yémen a déjà un gouvernement fragile et les événements en Egypte vont encore plus le mettre sous pression. Toute faiblesse du gouvernement central renforcera sans doute les moudjahidines dans ce pays béni.”

Awlaki refuse l’argument idéologique, argumentant que, pour Al-Qa’ida, les “printemps arabes” constituent du pain béni dans la mesure où ceux-ci ont permis la libération d’importantes capacités en personnel (jihadistes enfermés) ou, comme nous l’avons vu ci-avant, militaires (armement).

Il est donc parfaitement possible d’argumenter qu’Al-Qa’ida soit idéologiquement défaite par les printemps arabes (même si son idéologie est obsolète depuis un certain temps déjà), alors que la menace s’est accrue du fait des capacités supplémentaires (en personnel, en fonds, en armes) dont disposent – ou pourraient disposer- les différentes branches.

En termes de personnel, la menace ne doit cependant pas être surestimée: en effet, il n’est pas clair dans quelle mesure d’anciens jihadistes libérés, probablement torturés et maltraités durant des années en prison, souhaiteront continuer la lutte.

4.5.2. Yémen: un “long printemps” et une guerre de clans

Alors que les printemps tunisien et égyptien avaient duré à peine quelques semaines, la révolte yéménite est maintenant entrée dans son sixième mois.

Débutée à la fin janvier par des manifestations contre le pouvoir du président Ali Abdallah Saleh, celle-ci s’est transformée en guerre de clans, opposant différentes familles très influentes, les Saleh et les Al-Ahmar.

C’est dans ce cadre qu’a été grièvement blessé le président Saleh, gravement brûlé lors d’une attaque contre son palais. Transféré en Arabie Saoudite au début juin, celui-ci n’est pas rentré au pays.

C’est également au moins de juin que se sont évadés une soixantaine de détenus d’une prison à Moukalla, dans la province du Hadramaout, jouxtant le golfe d’Aden, le 22 juin. Une semaine plus tard, le groupe des “Partisans de la Shariah” qui seraient proches d’Al-Qa’ida, ont pris la ville de Zinjibar et déclaré “un Emirat islamique“ dans la zone qu’ils contrôlent.

Le vide du pouvoir laissé par Saleh, ainsi que l’instabilité qui règne dans le pays pourrait profiter à Al-Qa’ida, dont la branche régionale, AQPA, s’est déjà illustrée ces derniers mois, entre autres par le lancement d’Inspire qui constitue une tentative d’ouverture d’un front en Occident.

4.5.3 Un nouveau front en Occident?

Publié depuis un an maintenant, le magazine Inspire est né de la volonté d’Al-Qa’ida de s’adresser aux Musulmans occidentaux et ainsi d’ouvrir un nouveau front à l’ouest. En effet, depuis les attentats de Londres en 2005, toutes les tentatives d’attentats aux Etats-Unis ou Europe ont échoué.

Comme le révèle Inspire, ce front ne doit pas nécessairement être basé sur une organisation structurée qui bénéficierait de la franchise “Al-Qaida…” – tel AQMI ou AQPA – mais s’appuierait sur l’action d’individus isolés, sur le modèle de la “résistance sans leader“.

Il n’est donc pas surprenant que les cinq premiers numéros réguliers du magazine – à l’exception de l’édition spéciale de novembre 2010 – contiennent une traduction de l’Appel à la résistance islamique globale d’Abu Musab Al-Suri.

En effet, c’est dans cet ouvrage qu’Al-Suri se fait l’avocat de “l’école du jihad individuel et de petites cellules“, qu’il appelle également le “jihad du terrorisme individuel“, selon lequel la lutte doit être animée par des “unités de la résistance islamique globale“, composées soit d’individus isolés, soit de petites cellules de deux personnes ou plus qui se connaissent et agissent en toute confiance [4]. Même s’il est emprisonné depuis 2005, Al-Suri et son Appel n’en constituent pas moins une source d’inspiration importante dans les rangs jihadistes.

On peut noter que les extraits de l’œuvre d’Al-Suri publiés dans Inspire proviennent de la traduction proposée par Brynjar Lia dans son ouvrage Architect of Global Jihad: The Life of Al-Qaeda Strategist Abu Mus’ab Al-Suri, autour duquel terrorisme.net avait publié un entretien. Tout en constatant quelques adaptations stylistiques et graphiques, le texte est strictement identique [5].

Au début du mois de juin 2011, Adam Gadahn, mieux connu sous le nom d’Adam “Al-Amriki” (ou “Adam l’Américain”) a publié une vidéo dans laquelle il incitait des jeunes musulmans vivant aux Etats-Unis à acheter des armes à feu et à passer à l’action de façon individuelle.

Cette vidéo illustre la tentative d’ouverture d’un nouveau front occidental. On y voit également des images de récents cas de “jihadisme solitaire“, le “loup de Fort Hood“, Malik Nidal Hassan et le jeune nigérien Umar Faruq Abdulmuttalab.

Il n’est pas clair dans quelle mesure l’objectif d’Al-Qa’ida d’ouvrir un front occidental sera couronnée de succès. L’idée n’est pas nouvelle et, même si les exemples de “loups solitaires” inspirés par Al-Qa’ida se sont multipliés ces dernières années (attentats de Madrid en 2004, assassinat du réalisateur néerlandais Théo van Gogh par le groupe Hofstadt la même année, tentative d’attentats à la bombe sur le réseau ferroviaire allemand en 2006, tentative d’attentats à l’aéroport de Glasgow en 2007, loup de Fort Hood en 2009, attaque à l’aéroport de Francfort en mars 2011, etc.), cette nouvelle génération de terroristes ne bénéficie que de capacités limitées.

Pourtant, la “propagande par le fait” que représente le “jihad solitaire” ou “sans leader” ne peut être efficace que si le flot d’actions est ininterrompu, et surtout couronné de succès. Cela est loin d’être le cas.


Conclusion: la dixième vie d’Al-Qa’ida?

Dix ans après les attentats du 11 septembre, huit ans après l’invasion américaine en Irak, Al-Qa’ida a réussi à survivre, malgré les efforts investis dans la lutte contre le terrorisme. Même si le message de l’organisation fondée par Oussama ben Laden est obsolète et que sa doctrine du “il n’y a d’autre solution que le jihad” a été balayée par les printemps tunisien et égyptien, les événements en Lybie et au Yémen risquent de renforcer les capacités opérationnelles de certaines branches, telles AQMI ou AQPA.

Il est donc fort probable que l’organisation passée sous le contrôle d’Ayman al-Zawahiri n’ait pas encore écrit les dernières lignes de son histoire…


Notes
(1) Les traductions françaises de l’ouvrage d’Ayman Al-Zawahiri sont tirées de Gilles Kepel (éd.), Al-Qaida dans le texte, PUF, 2005, pp. 285-309

(2) Pour une chronologie des actions d’Al-Qa’ida, voir Mohammad-Mahmoud Ould Mohamedou, “The Many Faces of Al-Qaeda in the Islamic Maghreb”, GCSP Policy Paper no15, mai 2011, accessible à l’adresse http://www.gcsp.ch/News-Knowledge/Publications/The-Many-Faces-of-Al-Qaeda-in-the-Islamic-Maghreb.

(3) Pour une réflexion influente autour de la distinction entre terrorisme et guérilla, voir Ariel Merari, “Du terrorisme comme stratégie d’insurrection” dans Gérard Chaliand et Arnaud Blin (dir.), Histoire du terrorisme: de l’Antiquité à Al Qaida, Bayard, 2005, pp.23-55

(4) Pour quelques éléments de discussion autour de la “résistance sans leader” et d’Abu Musab Al-Suri, voir Jean-Marc Flükiger, Nouvelles guerres et théorie de la guerre juste, Editions Infolio, Gollion, 2011, pp.39-46.

(5) Brynjar Lia, Architect of Global Jihad: The Life of Al-Qaeda Strategist Abu Mus’ab Al-Suri, Hurst, Londres, 2007. Le premier numéro d’Inspire publié en juillet 2010 utiliser la traduction des pages 347 à 359 du livre de Lia, le numéro régulier paru en automne 2010 les pages 360-370, le numéro de janvier 2011 les pages 371-382, le numéro de mars 2011 les pages 382 – 391 et le numéro de juillet 2011 les pages 391-393.

Modifications de l’article: ajouts mineurs mis en ligne dans deux passages le 4 août 2011.

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New book: The Islamic State in Africa
The Emergence, Evolution, and Future of the Next Jihadist Battlefront (Hurst)

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The Islamic State in Africa | Hurst Publishers

A continent-wide survey of Islamic State's presence, local allies and trajectories of violence in Africa.

www.hurstpublishers.com

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Nouvelle étude @Fondapol "Les attentats islamistes dans le monde 1979-2021".
Deux ans après une première édition, nous proposons une mise à jour de notre base de données qui s’étend jusqu’en mai 2021.
📖 L'analyse http://bit.ly/3gYKq68
📈 Les données http://bit.ly/2VhCLs2

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